2. A. Les prépositions atones

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A

Remarques

  • L'article défini masculin lo, los se contracte avec a; on a alors les formes au, aus.
  • A prend la forme ad devant la voyelle initiale:

- d'un pronom personnel: ad eth, ad era, ad eths, ad eras.

- d'un démonstratif: ad aqueste, ad aqueth, ad aceth, ad açò, ad aquò, ad aquerò, ad acerò.

- d'un indéfini:

Ne pensavi pas mei ad arren. (L'estranh): "Je ne pensais plus à rien."

shens n'aver parlat enqüèra ad arrés (Casebonne): "sans en avoir encore parlé à personne"

- du numéral amdús:

Ad amdús, hò, balhatz era patz! (Sarrieu): "À tous deux, oh, donnez la paix!"

- dans certains parlers seulement, d'un infinitif:

... perqué e prenèn tant de plaser a s'espiar aus uelhs, ad arríder amassas... (Hustach): "... pourquoi ils prenaient tant de plaisir à se regarder dans les yeux, à rire ensemble..."

Mais il est plus courant de dire a arríder.

- dans de rares parlers, du nom d'une locution exprimant la distribution:

E ad arpats los sovenirs qu'arribavan entà viéner horucar hens lo còr las plagas qui avè hèit un passat dolorós. (Casebonne): "Et par lambeaux les souvenirs arrivaient pour venir fouiller dans le coeur les plaies qu'avait faites un passé douloureux."

On dit beaucoup plus couramment a arpats.

  • En Gascogne orientale, on emploie a-n- dans les mêmes cas:

a-n-aquera hornèra (Daubian): "dans ce fournil"


Emploi

  • A peut être l'équivalent de la locution fr. "lors de":

la soa darrèra carta [letra] a la declaracion de guèrra (Camélat): "sa dernière lettre, lors de la déclaration de guerre".

  • A est souvent remplacé par la conjonction de coordination e lorsqu'il établit une relation entre deux éléments de même nature et répétés: on dit ainsi facilement cap e cap, còsta e còsta, ras e ras, etc.


DAB

Formes

  • La forme de l'ancien gascon était ab. Elle s'est conservée dans le parler de Salies.
  • Dans le Gers, le Lot-et-Garonne et le Comminges, on emploie les formes dambe, damb:

los de la Bigòrra dambe los de Pau (Sarran): "les gens de la Bigorre avec les gens de Pau"

nomada damb *reson bèra pèrla gascona (Lacroix): "nommée avec raison belle perle gasconne"

Il existe des parlers où l'article défini masculin lo, los se contacte avec DAMBE; on a alors dambeu, dambeus.


Pronciation

dab se prononce [dap], [dat] ou [dab]. Toutefois, en raison des particularités de la phonétique gasconne, la prononciatio [dab] n'est pas possile devant une pause ou devant une consonne sourde.


Emploi

L'emploi de dab est plus large que celui de la préposition fr. "avec"; DAB peut être l'équivalent du "de" de moyen, introduire une locution de temps ou exprimer la cause:

Qu'arribèi dab la nueit. (Arantxa): "J'arrivai à la nuit."

... mès après qu'avèn tirat lunh entà la lana, entà capvath, e s'èran, dab la nueit, enganats dus còps. (Manciet): "... mais après ils s'étaient éloignés en direction de la lande, vers le sud, et ils s'étaient, à cause de l'obscurité, trompés deux fois."


DE

Remarques

  • De devient d' devant voyelle.
  • L'article défini masculin lo, los se contracte avec de: on a alors les formes deu, deus.


Emploi

  • De précède parfois une autre préposition:

la pièla de suu solèr (Palay): "le tas qui est dans le grenier"

  • De remplace a des locutions prépositives lorsqu'il s'agit d'un complément du nom ou d'un mouvement à partir d'un lieu:

Un còp esdejuat, que s'anè esténer tà léger devath deus averanhèrs qui bordejavan ua camiassa deu ras de casa. (Peyroutet): "Après avoir déjeuné, il alla s'allonger pour lire sous les noisetiers qui bordaient un mauvais chemin proche de la maison."

Que'm sembla que non me'n saurí mei anar deu ras de vos. (Casebonne): "Il me semble que je ne pourrais plus m'en aller d'auprès de vous."

  • De peut introduire une groupe nominal employé exclamativement:

D'aqueth gusard de Jausèp, que's gahava la paloma abans que non s'envolèsse! (Despourrin): "Ce chenapan de Joseph, il se prenait la palombe avant qu'elle ne s'envole!"

Diu! d'aqueras manetas, / que valen un tresaur. (De Mesplès): "Mon Dieu! ces mains, elles valent un trésor."

  • De précède les adverbes et expressions de temps dans les phrases négatives:

Non viés pas de uei? (Bouzet): "Tu ne viens pas aujourd'hui?"

  • En Béarn notamment, de est employé avec tot devant les adverbes et expressions de temps:

Hèra que parlàvatz de las campanas tot d'aqueste matin. (Bouzet): "Vous parliez beaucoup des cloches toute la matinée."


DENS

Remarques

  • Il existe une variante hens employée dans l'ouest et le centre du Béarn. Elle s'explique par dehens; celui-ci à son tour s'explique par le h de dehòra; la forme primitive était sans doute dedens partout.
  • On prononce [denz], [henz] devant une voyelle et [den], [hen] devant une consonne:

hens un prat [henzỹˈpɾat]

dens lo prat [denluˈpɾat]


Emploi

L'emploi de dens, hens, en gascon est proche de celui qui de la préposition fr. correspondante "dans". Pour en savoir plus, v. la fiche 2. D. Emploi des prépositions: comparaison entre le français et le gascon.


EN

Remarque

En se contracte avec l'article défini pyrénéen; on a alors les formes en (< en + eth), ena (> en + era), ens (< en + eths), enas (en + eras):

Ò Pelòt, doç amic, sarra'm viste ens tués braç. (Lavit): "Ô Pelot, mon bien-aimé, serre-moi vite dans tes bras."


Emploi

  • Comme en fr., en exprime le lieu où l'on se trouve concuramment avec a et dens, mais les deux usages, celui du gascon et celui du fr., ne se recoupent pas exactement; v. la fiche 2. E. A, EN et DENS.
  • En s'emploie devant un nom désignant un âge de la vie attribut ou apposé:

Argelèrs, qui lo vis en mainat, ès gaujós? (Camélat): "Argelès, qui l'as vu enfant, es-tu joyeux?"

Que la ns'avèm crompada en poria. (Camélat): "Nous l'avions achetée pouliche."

  • En est parfois utilisé pour renforcer per et per'mor de, plus rarement pour renforcer dab:

Los felibres que l'aiman, non pas, au segur, coma çurgents de lenga que passan son temps dens las escòlas a copar a tròcis e bocins, ser un tablèu negre, ua en per ua, las letras de cada mòt. (Saint-Bézard): "Les félibres l'aiment, pas, bien sûr, en tant que chirurgiens de langue qui passent leur temps à l'étudier par le menu, sur un tableau noir, une par une, les lettres de chaque mot."

Que m'ac datz tot en per los bons suenhs. (Palay): "Vous me donnez tout pour mes bons soins / en échange de mes bons soins."

decidar en per eth çò qui calè minjar, quina pelha hicà's e çò qui calè har. (Peyroutet): "décider pour lui / à sa place / ce qu'il fallait manger, quel vêtement se mettre et ce qu'il fallait faire."

Se los vòs en per arren... (Bladé): "Si tu les veux pour rien..."

Que m'a hèit assèder e dab gran cortesia que m'a declarat que lo men avocat, "en per'mor d'un contratemps", n'èra pas podut viéner. (L'estranh): "Il m'a fait asseoir et très poliment m'a déclaré que mon avocat, à cause d'un contre-temps, n'avait pas pu venir."

No's conde cap se quin se n’arreglèren en dab es hemnes qu'avién portat es flascos. (Sabada): "On ne raconte pas comment ils s'arrangèrent avec les femmes qui avaient porté les flacons."

Que diseratz a la vòsta mair que soi plan contenta d'aver passat ua tan bona pausa en dab era. (Hustach): "Vous direz à votre mère que je suis bien contente d'avoir passé un si bon moment avec elle."

  • En per peut s'employer absolument dans le sens de "en échange":

E vos, qué'm daratz en per? (Courriades): "Et vous, que me donnez-vous en échange?"


ENDE

Ende s'emploie à la place de , entà dans une large zone qui regroupe la plus grande partie du Gers, le Lot-et-Garonne et le Tarn-et-Garonne. V. ENTÀ. S'agissant d'un mot de deux syllabes, il y a lieu de lui appliquer la même règle qu'à sonque et de ne pas l'élider devant la voyelle qui suit, sachant que de toute façon l'élision de -e atone final devant voyelle a lieu dans la prononciation, selon les règles de la phonétique gasconne.


ENTÀ

Remarques

  • Entà devient souvent par aphérèse. On emploie indifféremment les deux formes; néanmoins, à l'intérieur d'une même phrase, si on a employé entà, la règle est d'employer ensuite (Aitor Carrera, Gramatica aranesa, p. 254).
  • Entà prend la forme entad, de même que prend la forme tad, dans les mêmes cas où a prend la forme ad. V. 1. 1.

Qu'ac sèi que soi vailet, non totun lhèu tad aqueths tribalhs. (Camélat): "Je le sais, que je suis valet, mais pas quand même pour ce genre de travaux."

Mes totun, non voi pas estar viengut ací tad arren! (Palay): "Mais quand même, je ne veux pas être venu ici pour rien!"

  • Dans de rares parlers, entà devient entad devant la voyelle initiale d'un adverbe de lieu:

Mès com ès tad ací pujada? (Sarrieu): "Mais comment es-tu ici montée?"

Mais dans la plupart des parlers, se réduit à t' devant ací, aciu, aquí, aquiu, acerà, enlòc et on:

Aqueth estiu, Tresina que vienè t'ací guardar las vacas lo dimenge vrèspe. (Casebonne): "Cet été, Trésine venait ici garder les vaches le dimanche après-midi."

Ne vau pas t'enlòc. (Hustach): "Je ne vais nulle part."

T'on anarà? (Lalanne): "Où ira-t-il?"

On admet cette élision devant certains noms de lieux commençant par a:

T'Aussau, jo me n'i vau! (Eyt): "En Ossau, j'y pars!"

En poésie, on pourra même l'admettre devant un infinitif. Mais dans aucun des cas ci-dessus, cette élision ne doit être considérée comme obligatoire à l'écrit. Certains parlers emploient tà on, sans contraction:

Tà on te'n vas, princessa? (Sarrieu): "Où t'en vas-tu, princesse?"

  • La contraction peut avoir lieu aussi devant le pronom personnel ac; toutefois, on trouve plus fréquemment tad ac:

tà'c estudiar a lor (Lapassade): "pour l'étudier chez eux"

Aquerò que's sabè, mes non n'aurén trobat un dens lo vilatge tad ac díser? (Camélat)

  • L'article défini masculin lo, los se contracte avec ENTÀ; on a alors entau, entaus. De même, avec , on a tau, taus.

Ces contractions sont obligatoires, y compris dans les cas d'emploi pronominal de lo, los:

toflanas (...) trèssas, entaus mainatges (Palay): "des galettes gonflées (...) des tresses, pour les enfants"

La fortuna n'ei pas tau qui la cèrca, mes tau qui la tròba. (Lalanne): "La fortune n'est pas pour celui qui la cherche, mais pour celui qui la trouve."


Emploi

  • Avec estar, entà indique un déplacement momentané, qui ne va pas durer:

Lo *Talhur qu'ei tà las aigas d'Escòt. (Badiolle): "Le Tailleur est aux eaux à Escot." (sous-entendu: il va bientôt revenir.)

  • Entà signifie "chez" dans une grande partie du Gers; v. la fiche 2. G. Les équivalents de CHEZ. Dans ces parlers, le sens habituel de entà est rendu par ende; v. 6.
  • Entà peut remplacer a d'une locution prépositive lorsqu'il y a une idée de mouvement:

Lo Capdèth que barra la pòrta, puish que se'n torna tau ras de Jan. (Al-Cartéro): "Le Cadet ferme la porte, puis revient à côté de Jean."

  • Entà peut précéder une autre préposition lorsqu'il y a mouvement en direction d'un lieu:

Que's deishè càder tà hens l'èrba. (Peyroutet): "Il se laissa tomber dans l'herbe."

Que getèn ua granada tà dens lo bar. (Javaloyès): "On jeta une grenade dans le bar."

Lo renard que gradilhà tà sus las soas espatlas. (Lalanne): "Le renard grimpa sur ses épaules."

Jo donc, lavetz, que me'n torni tà devath las aprigas. (Al-Cartéro): "Eh bien, alors, je repars sous les couvertures."

  • peut introduire un complément de temps pour indiquer qu'il s'agit d'un moment futur:

Tau ser que't diserèi çò qui averàs a har. (Palay): "Ce soir je te dirai ce que tu auras à faire."

Que'ns vederam tà la hera a Sent Miquèu a Tarascon. (Nadau): "Nous nous verrons à la foire à la Saint-Michel à Tarascon."

Qu'ei tà de uei en ueit. (Sègues): "C'est aujourd'hui en huit." <Qu'ey ta de oéy en oéyt.>

Dens quinze dias que serèi a Madrid, tà l'estiu que serèi a Lorda. (L'òrra istoèra d'un hilh de Gelòs): "Dans quinze jours je serai à Madrid, l'été prochain je serai à Lourdes."


PER

Remarques

  • L'article défini masculin lo, los se contracte avec per; on a alors les formes peu, peus; preu, preus dans les Landes. Cette contraction ne se produit pas dans tous les parlers et il est donc correct d'écrire per lo, per los.
  • Il se produit en outre une contraction avec ací et aquiu: on dit souvent per 'cí, per 'quiu (pr'ací, pr'aquiu dans certains parlers). En Armagnac, per aquò devient pr'aquò. En outre, dans le parler de Luchon et dans ceux du Val d'Aran, per aquerò se contracte à l'oral et on dit [paɾɾˈkɾɔ].


Emploi

  • Comme le fr. "par", per s'emploie pour introduire le nom d'un lieu par lequel on passe:

Non passi guaire jamei per la castanhèra de Tarac. (Camélat): "Je ne passe pratiquement jamais par la châtaignerie de Tarac."

  • Per indique aussi un lieu imprécis ou un mouvement à l'intérieur d'un lieu:

Qu'avè demandat a partir entà l'Indochina on lo tractament èra de hèra miélher que per França. (Palay): "Il avait demandé à partir pour l'Indochine où le traitement était de loin meilleur qu'en France."

... d'anar segotir las provas de la Crampa deus deputats e de caminar per París en torrombiòla!!! (Badiolle): "... d'aller secouer les poussières de la Chambre des députés et de se déplacer dans Paris en bagnole!!!"

  • Per peut précéder une autre préposition:

per sus la plana (Al-Cartéro): "sur la plaine"

per hens las praderias (Labaig-Langlade): "dans les prairies"

  • Per peut remplacer la préposition a d'une locution prépositive s'il s'agit d'indiquer le lieu où l'on passe, un lieu imprécis ou un mouvement à partir d'un lieu:

Qu'ei atau entaus qui demoran peu ras de las garas. (Oéy en Bearn): "C'est comme ça pour ceux qui habitent à côté d'une gare." <Qu'ey atau entaus qui demouren pou ras de las gares>

  • Per sert à introduire les compléments de temps indiquant un moment de l'année:

E que te'n das de m'èster engontrat per la hèira de Sent Andrèu dab la Frosí? (Camélat): "Et tu fais du souci de ce que j'aie passé un moment à la foire de la Saint-André avec Frosi?"

Com l'an precedent, que tornèi tà Gelòs per Nadau. (L'òrra istoèra d'un hilh de Gelòs): "Comme l'année précédente, je revins à Gelos à Noël."

Qu'èri en çò de Jusèp per Nosta Dama. (Sègues): "J'étais chez Joseph à l'Assomption."

Ne'us demora pas que un aute gojat qui vien d'acabar lo servici e ua gojata qui a hèit vint e un ans per segar, mentavuda Maria. (Casebonne): "Il ne leur reste qu'un autre garçon qui vient de terminer son service et une fille qui a fait vingt-et-un ans au moment de la moisson, nommée Marie."


SUS

Remarques

  • L'article défini masculin lo, los se contracte avec SUU; on a alors les formes suu, suus, qui se prononcent, selon les lieux, [su], [sus] ou [sɔw], [sɔws]. Cette contraction ne se fait pas dans tous les parlers et il est donc correct d'écrire sus lo, sus los; généralement, le second -s s'assimile au l- initial des articles et on prononce [syllu], [syllus].
  • Il n'y a pas de contraction de sus avec l'article défini masculin pyrénéen eth, eths.
  • Il existe aussi une autre préposition signifiant "sur": suber. Elle ne subsiste guère que dans l'usage littéraire, mais c'est d'elle que dérive les formes ser, sur, employées notamment dans le Gers et le Tarn-et-Garonne au lieu de sus.


Emploi

  • Sus peut être précédé de de pour indiquer un mouvement à partir d'un lieu:

Que caleré totun tirar de sus las taulas e de sus las cadièras totas aqueras raubas e vesticis. (Camélat): "Il faudrait tout de même enlever de sur les tables et de sur les chaises toutes ces robes et tous ces vêtements."