Différences entre les versions de « 5. Sous-dialectes et parlers gascons »

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== Le gascon pyrénéen ==
== Le gascon pyrénéen ==
C’est dans les vallées montagnardes, qui lui donnent son nom, que nous trouvons le gascon pyrénéen. Les parlers pyrénéens accumulent les traits qui donnent au gascon sa spécificité dans l’ensemble occitan. D’ouest en est, on trouve le pyrénéen occidental (aspois-barétounais et ossalois), le pyrénéen central (parlers lavedanais et du Haut-Adour), le pyrénéen oriental (vallée d’Aure, Louron, Barousse, Haut-Comminges et Couserans où cinq parlers ont été identifié (Ensergueix 2012): bas-couserannais, haut-couserannais, castillonnais, volvestrais et massatois, celui-ci présentant plusieurs traits languedociens). Le gascon-pyrénéen emploie l'article défini '''eth''', '''era''' (2).
* L’aspois-barétounais, qui n’est parlé que dans deux vallées, a conservé les occlusives sourdes [k], [p], [t] du latin à l’intervocalique: '''sèca''' "ronce", ailleurs '''sèga'''; '''sapa''' "sève", ailleurs '''saba'''; '''Que’m sòi lhevata''' 'je me suis levée", à Pau et Oloron '''Que’m sòi lhevada'''.
C’est un cas de conservatisme unique dans la Romania occidentale, que ces parlers partagent avec le basque. Ces mêmes consonnes sourdes se sonorisent après nasale: '''blanga''' "blanche", ailleurs '''blanca'''; '''crombar''' "acheter", ailleurs '''crompar'''; '''candar''' "chanter", ailleurs '''cantar'''.
Ce ne sont pas les seuls traits originaux de ces parlers qui emploient, par exemple, le verbe '''ir''' "aller" ou réalisent localement [j] le suffixe –''atge'': '''vilatge''' [biˈlaje].
* L'ossalois a des affinités avec l'aspois-barétounais: il dit '''blanga''', '''crombar''', '''candar''', mais a subi l'influence des parlers de la plaine, avec laquelle de nombreux contacts semblent avoir existé depuis longtemps. Ainsi, il emploie l'article
Cependant, les parlers qui présentent le gradient de gasconnité  le plus élevé en même temps qu’un certain nombre de caractéristiques propres sont ceux du Lavedan ; par ex. :
• conjugaison originale des auxiliaires : par ex. èm pour avem, dès et de pour ès et ei)
• passage de au prétonique à ai : airà « il aura »)
• chute du D intervocalique latin : CADERE > cair ou quèr « tomber », pruèra, polh…
Ces parlers présentent aussi un nombre de mots prélatins plus élevé qu’ailleurs.
Plus à l’est, les parlers du Haut-Comminges et du Couserans, au nombre desquels on peut compter les parlers du Val d’Aran, présentent des spécificités, parfois localisées, comme :
• la prononciation /jɔ/ de l’article indéfini féminin ua ;
• la prononciation [tʲ] ou [ʧ] du –t final (prat [praʧ], « pré ») ;
• le pluriel en –i ou -is de certains déterminants et adjectifs : vòsti drets « vos droits », aquestis ans « ces dernières années » ;
• la forme enà de la préposition ende / entà « pour » ;
• les prétérits en –e (batec « il battit ») que l’on retrouve plus au nord.
Ils ont aussi quelques affinités avec les parlers languedociens proches :
• diphtongaison en –i des groupes voyelle + -s devant certaines consonnes : desbrembar [deɪβremˈβa], vos demandi [buɪ ðeˈmanði] ;
• imparfaits en –iá pour les verbes du deuxième et du troisième groupes.




(1) Le catalan oriental prononce lui aussi [ə] ''a'' et ''e'' finaux, et d'ailleurs généralement tous les ''a'' et ''e'' atones.
(1) Le catalan oriental prononce lui aussi [ə] ''a'' et ''e'' finaux, et d'ailleurs généralement tous les ''a'' et ''e'' atones.
(2) Celui-ci déborde du domaine pyrénéen en direction de la plaine: Olorn, Lucq-de-Béarn et Tarbes l'emploient.

Version du 11 décembre 2019 à 13:44

Si l'occitan connaît une grande diversité (variation interne, en terme de linguistique), il en va de même, à son tour, pour le gascon: du Médoc aux vallées pyrénéennes et de la côte atlantique aux rives de la Garonne, celui-ci est divisé en sous-dialectes, qui comprennent chacun plusieurs parlers. On a néanmoins pu identifier, au sein du gascon, trois sous-dialectes: le gascon occidental, le gascon pyrénéen et le gascon oriental.


Le gascon occidental

Le gascon occidental regroupe des parlers qui ont en commun la neutralisation de a et e post-toniques, c’est-à-dire que la distinction n’est plus faite dans la prononciation et qu’ils sont tous deux réalisés [ə]: vaca [ˈbakə] "vache", compte [ˈkuntə] "homme". Cela a généralement pour conséquence l’apparition de subjonctifs en i, comme en catalan oriental (1), afin d’éviter que ce temps ne soit identique à l’indicatif présent: Que cantas, Que vui que cantis.

Les parlers les plus occidentaux (gascon noir et médoquin) sont les plus divergents par rapport au languedocien, dialecte central de l’occitan. Le gascon noir présente la particularité de prononcer le e [ø]: negre [ˈnøɣrə]. Sur une partie du territoire de ce parler, on a bien d’autres particularismes: phonétiques comme la réduction de la diphtongue ue à u (huec [hyk] "feu") et de la triphtongue ueu à uu (buu [byw] "boeuf"), particularismes morphologiques comme les formes em, et, es… des pronoms personnels compléments, le nombre relativement faible de verbes à conjugaison inchoative ou l’imparfait en –ivi de certains verbes en –er (caliva "il fallait"), particularismes syntaxiques comme la généralisation du relatif dont dans tous les cas. Le gascon noir va de Bayonne au sud-ouest de la Gironde (hors bassin d’Arcachon) en englobant la moitié occidentale des Landes.

Il faut entendre par médoquin un ensemble de parlers qui couvrent, en plus du Médoc, Bordeaux et ses environs et le nord du bassin d’Arcachon. Nous rencontrons ici aussi une puissante originalité au sein de l’ensemble gascon tant dans le lexique, souvent très francisé, que dans la phonétique comme le passage à [ə], voire la chute, de a prétonique: cantarà [kantəˈra], voire [kantʔˈra], ou, localement, la réalisation [u] de –a final (vaca [ˈbaku]), ou que dans la morphologie (prétérits en –u- des verbes du troisième groupe, désinence -re à l’infinitif de certains d’entre eux).

Plus à l’est, les parlers du Bazadais, de l’Albret et de la Chalosse s’écartent moins des autres parlers gascons.

Le gascon occidental s’étend à l’ouest d’une ligne Agen-Pau et englobe la totalité de la Gironde et des Landes, le sud-ouest du Lot-et-Garonne, quelques communes du nord-ouest et de l’ouest du Gers et un grand nord-ouest du Béarn, ainsi que le Bas-Adour.


Le gascon pyrénéen

C’est dans les vallées montagnardes, qui lui donnent son nom, que nous trouvons le gascon pyrénéen. Les parlers pyrénéens accumulent les traits qui donnent au gascon sa spécificité dans l’ensemble occitan. D’ouest en est, on trouve le pyrénéen occidental (aspois-barétounais et ossalois), le pyrénéen central (parlers lavedanais et du Haut-Adour), le pyrénéen oriental (vallée d’Aure, Louron, Barousse, Haut-Comminges et Couserans où cinq parlers ont été identifié (Ensergueix 2012): bas-couserannais, haut-couserannais, castillonnais, volvestrais et massatois, celui-ci présentant plusieurs traits languedociens). Le gascon-pyrénéen emploie l'article défini eth, era (2).

  • L’aspois-barétounais, qui n’est parlé que dans deux vallées, a conservé les occlusives sourdes [k], [p], [t] du latin à l’intervocalique: sèca "ronce", ailleurs sèga; sapa "sève", ailleurs saba; Que’m sòi lhevata 'je me suis levée", à Pau et Oloron Que’m sòi lhevada.

C’est un cas de conservatisme unique dans la Romania occidentale, que ces parlers partagent avec le basque. Ces mêmes consonnes sourdes se sonorisent après nasale: blanga "blanche", ailleurs blanca; crombar "acheter", ailleurs crompar; candar "chanter", ailleurs cantar.

Ce ne sont pas les seuls traits originaux de ces parlers qui emploient, par exemple, le verbe ir "aller" ou réalisent localement [j] le suffixe –atge: vilatge [biˈlaje].

  • L'ossalois a des affinités avec l'aspois-barétounais: il dit blanga, crombar, candar, mais a subi l'influence des parlers de la plaine, avec laquelle de nombreux contacts semblent avoir existé depuis longtemps. Ainsi, il emploie l'article

Cependant, les parlers qui présentent le gradient de gasconnité le plus élevé en même temps qu’un certain nombre de caractéristiques propres sont ceux du Lavedan ; par ex. : • conjugaison originale des auxiliaires : par ex. èm pour avem, dès et de pour ès et ei) • passage de au prétonique à ai : airà « il aura ») • chute du D intervocalique latin : CADERE > cair ou quèr « tomber », pruèra, polh… Ces parlers présentent aussi un nombre de mots prélatins plus élevé qu’ailleurs. Plus à l’est, les parlers du Haut-Comminges et du Couserans, au nombre desquels on peut compter les parlers du Val d’Aran, présentent des spécificités, parfois localisées, comme : • la prononciation /jɔ/ de l’article indéfini féminin ua ; • la prononciation [tʲ] ou [ʧ] du –t final (prat [praʧ], « pré ») ; • le pluriel en –i ou -is de certains déterminants et adjectifs : vòsti drets « vos droits », aquestis ans « ces dernières années » ; • la forme enà de la préposition ende / entà « pour » ; • les prétérits en –e (batec « il battit ») que l’on retrouve plus au nord. Ils ont aussi quelques affinités avec les parlers languedociens proches : • diphtongaison en –i des groupes voyelle + -s devant certaines consonnes : desbrembar [deɪβremˈβa], vos demandi [buɪ ðeˈmanði] ; • imparfaits en –iá pour les verbes du deuxième et du troisième groupes.








(1) Le catalan oriental prononce lui aussi [ə] a et e finaux, et d'ailleurs généralement tous les a et e atones.

(2) Celui-ci déborde du domaine pyrénéen en direction de la plaine: Olorn, Lucq-de-Béarn et Tarbes l'emploient.