5. Mots à revoir

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Le dictionnaire de Per Noste est d'un niveau globalement satisfaisant, mais l'orthographe de certains mots gascons y est à revoir; nous ne traiterons ici que de quelques cas.


A

*ÀNJOL

L'étymologie étant ANGELU, il n'y a pas lieu d'adopter cette graphie faussement étymologique. On écrira anjo. On évitera tous les -l muets en fin de mot puisque le -l final roman s'est vocalisé en gascon; on écrira còsso et non *còssol (et encore moins *cònsol). On admettra capítol, títol parce que ces formes sont largements socialisées, mais il faut les prononcer correctement, sans [l] final: [kaˈpitu ], [ˈtitu].

*AUTORN DE

On écrit au près, on écrira donc au torn de, d'autant plus que l'on dit tirà's deu torn, Que'm virava au torn.


B

BRUTLAR

[bɾylˈla] doit-il s'écrire brutlar ? Dans la mesure où le Palay donne une variante de prononciation [brynˈla], cette orthographe est sans aucun doute correcte: on sait que le groupe de consonnes TL se prononce [nl] dans de nombreux parlers. Pour autant, elle n'englobe pas toutes les terminaisons possibles: Palay donne aussi <bruslà>, et Camélat a écrit ce mot ainsi dans toute son oeuvre. Il convient donc d'accepter une forme bruslar (prononcée [bɾylˈla] ou [bɾyzˈla], forme au moins béarnaise et lavedanaise, en plus de brutlar. Au demeurant, cela est conforme à l'étymologie USTULARE (voir ici: [1]).


C

*COLHON ET DÉRIVÉS

Palay écrit <couyoû>. Il s'agit visiblement d'une prononciation déformée par euphémisme de colhon. On distinguera donc coion "sot, imbécile" de colhon (vulg., "testicule).


*COLPA

Ce l s'est vocalisé très tôt et n'est prononcé nulle part; on écrira copa; de même, on écrit vop (< VULPE) et pas *volp.


*CONSIRAR

Le n de ce mot ne se prononce nulle part; il était d'ailleurs déjà muet en latin parlé. On écrira 'cossirar.


*CORBAISH

Ce mot, qui est une variante de corbàs, doit être écrit corbash. Nous nous permettons de renvoyer à la fiche sur l'emploi de CH, SH et TH: [2]


D

DESAPARÉISHER

Desaparéisher existe:

Que desapareishèn, un còp « vrenhas hèitas », dinc a un aute torn. (Palay)

Que desapareish ua pausa. (Bouzet)

Mais cette forme semble moins courante que desparéisher:

De dia en dia la plaga que despareish. (Abadie)

Los dus auts que despareishen. (Palay)

Narcisse Labòrda que despareishè. (Camélat)

Lo cafard despareish davant lo vin, se ne bevan pas tròp. (Saint-Bézard)

La soa familha que despareish deus actes de la vila de Montrejau. (Camélat)

L’avion despareishè tot doç, mèi immobil que la nueit. (Manciet)

Qu’anèi de cap ad eths e que despareishón. (Javaloyès)

Desparéisher est en outre la forme donnée pour l'aranais sur le dictionnaire du site aranes.org Il faut donc privilégier cette forme.


E

*E DONC

E donc veut dire "et donc". Lorsqu'il s'agit de l'interjection qui signifie "eh bien !", il y a lieu d'écrire eh donc, et ce d'autant plus que dans de nombreux parlers on prononce [heˈðuŋ] ou [hɛˈðuŋ].


*EN DE BALAS

Cette locution doit s'écrire en de batles, conformément à la seule prononciation donnée par le dictionnaire de Simin Palay (<endebàlle̩s>) et à l'étymologie, arabe باطل‎ (bâṭil).


*ESBERIT

Le dictionnaire français-occitan limousin d'Yves Lavalade donnant la forme esverit [ejveˈɾiː] pour ce dialecte, il convient d'écrire esverit.


P

*PÉBER

La forme *péber est une innovation du dictionnaire de Per Noste. Il convient de revenir à pebe: puisqu'on écrit èster (naguère èste), en dépit de l'étymologie, réservons le -r final de ces mots paroxytons (à accent tonique sur l'avant-dernière syllabe) aux verbes. Ainsi, on écrira pebe comme libe sans considérations étymologiques oiseuses. Au demeurant, le latin PIPĔRE a sans doute fait d'abord, en gascon, ?pebre, dont la prononciation s'est ensuite simplifiée en [ˈpeβe] comme la prononciation de ?libre s'est simplifiée en [ˈliβe].


Q

*QUE

Dans le dictionnaire et les publications de Per Noste, figure une double graphie: que interrogatif, sans accent, et qué, avec accent:

  • Que dises ?
  • Ne sèi pas de qué parlas.

C'est l'usage languedocien depuis Alibert. Selon nous, cet usage ne convient pas au gascon et il convient de s'en écarter. En effet, en languedocien, lorsqu'un mot commence par que, ce que ne peut être qu'un pronom interrogatif. En français, c'est la plupart du temps un énonciatif et il convient de signaler les cas où ce n'en est pas un. En outre, dans les interrogations indirectes, cela permet de distinguer interrogatif et conjonction de subordination. On écrira donc qué dans tous les cas:

Qué vòs ?

Ne sèi pas qué hè.

On comparera à cet égard:

Qué pensas ?: "Que penses-tu ?"

et

Que pensas ?: "Tu penses ?"

Dans une longue phrase, comme ci-dessous, on n'aura pas besoin de regarder s'il y a un point d'interrogation à la fin pour savoir qu'on a affaire à une phrase interrogative:

Mes qué diseram deu cant tresau tant asprut e tant encantaire en un còp, on, au ras deu brèç, e ploramiqueja la nèna, e deu lheit on la joena mair ei gahada d’un pos de frèbe, e van e tornan los de casa dens l’angüeisha, largant plors e gemits estupats ? (Bourciez, traduction probablement de Camélat)