3. H. Le présent du subjonctif

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Paradigmes

Les terminaisons sont en italiques; en lettres capitales, l'infixe de la conjugaison inchoative.


Verbes réguliers: modèles

Le présent du subjonctif
CANTAR BÀTER DROMIR BASTIR
canti bati dromi bastESQUi
cantes bàtias drómias bastESCas
cante bàtia drómia bastESCa
cantem batiam dromiam bastESCam
cantetz batiatz dromiatz bastESCatz
canten bàtian drómian bastESCan


Verbes du troisième groupe: conjugaison inchoative et conjugaison non-inchoative

On se reportera à la fiche 3. B. Le présent de l'indicatif. Par ailleurs, comme on le voit dans le tableau ci-dessus, l'infixe, qui était -eish- au présent de l'indicatif, prend la forme -esc- au présent du subjonctif. Il existe aussi dans une partie du Béarn une forme -eshc- que l'on n'emploie pas à l'écrit.


Particularité orthographique

Au subjonctif des verbes en -LHER et -NHER, on maintient le -i- des terminaisons bien qu'il n'apporte rien pour la prononciation:

ARCUÉLHER: arcuelhi - arcuélhias - arcuélhia - arcuelhiam - arcuelhiatz - arcuélhian

ATÉNHER: atenhi - aténhias - aténhia - atenhiam - atenhiatz - aténhian


Verbes irréguliers

Certains subjonctifs irréguliers étant largement et de plus en plus concurrencés par les formes régulières, nous ne donnons pas toutes les formes verbales irrégulières, mais seulement celles que l'on doit connaître:

  • Verbes en -AR:

DAR: dei - des - - dem - detz - detz - den

Le subjonctif de dar est identique à son prétérit. L'accent de (monosyllabe) est d'usage pour distinguer ce mot de la préposition de. Il existe aussi dans le nord-ouest du Béarn des subjonctifs de dar analogiques de celui de har: dasqui - dasquis, ...; daci - dacis...

Se conjugue comme dar: redar.

ESTAR / ÈSTER: sii - sias - sia - siam - siatz - sian

ESTAR (2): estei - estés - esté - estem - estetz - estén

HAR / HÈR: forme 1: hasqui - hascas - hasca - hascam - hascatz - hascan

forme 2: haci - hàcias - hàcia - haciam - haciatz - hàcian

forme 3: hei - hes - he - hem - hetz - hen

La forme 1 (parfois conjugué avec des désinences régulières: hàsquias - hàsquia...) et la forme 2 sont toutes les deux valables. La forme 3, largement employée dans la littérature félibréenne, a pratiquement disparu des parlers.

  • Verbes en -ER:

AVER: agi - ajas - aja - ajam - ajatz - ajan

CÀBER: capi - càpias - càpia - capiam - capiatz - càpian

CONÉISHER: conegui - conegas - conega - conegam - conegatz - conegan

Si la forme régulière existe aussi, la forme irrégulière, employée en Armagnac, est d'un emploi plus large dans le domaine gascon. Nous conseillons de l'employer.

Se conjuguent comme conéisher: desconéisher, inconéisher, mesconéisher, (ar)reconéisher.

CRÉISHER: cresqui - crescas - cresca - crescam - crescatz - crescan

Se conjuguent comme créisher: acréisher, descréisher, hòracréisher, recréisher, subercréisher.

DÍSER: digui - digas - diga - digam - digatz - digan

Une forme régulière existe aussi, peu employée. Se conjuguent comme díser: (ar)redíser, benadíser, contradíser, desdíser, enterdise's, esdise's, interdíser (qui est un francisme à rejeter), maladíser, maudíser, medíser, mensdíser, predíser, suberdíser, susdíser.

LÉGER: legi - lejas - leja - lejam - lejatz - lejan

Se conjuguent comme léger: airéger, (ar)rehuéger, (ar)reléger, (ar)resléger, deléger, destréger, des·huéger, esléger, huéger, pertréger, retréger, sostréger, tréger.

NÈISHER: nasqui - nascas - nasca - nascam - nascatz - nascan

PODER: posqui - poscas - posca - poscam - poscatz - poscan

On trouve une variante avec [ʃ] (poshqui, poshcas...), déconseillée à l'écrit, et une forme avec les terminaisons régulières: pósquias - pósquia...

PRÉNER: prengui - prengas - prenga - prengam - prengatz - prengan

Se conjuguent comme préner: apréner, (ar)repréner, aigapréner, capprene's, còrpspréner, compréner, desapréner, despréner, incomprene's, entersuspréner, enterpréner, enteraprene's, gotapréner, incompréner, mauapréner, maupréner, mesprene's, suberpréner, suspréner.

La forme régulière existe aussi; cependant, la forme irrégulière présente l'avantage d'être identique au subjonctif de prénguer. Nous la conseillons donc.

SABER: sapi - sàpias - sàpia - sapiam - sapiatz - sàpian

La forme régulière existe dans le Gers.

TÉISHER: tesqui - tescas - tesca - tescam - tescatz - tescan

Se conjugue comme téisher: destéisher.

TIÉNER: tiengui - tiengas - tienga - tiengam - tiengatz - tiengan

La forme régulière existe aussi. La forme irrégulière présente l'avantage d'être proche du subjonctif de ténguer. Nous conseillons de l'employer.

Se conjuguent comme tiéner: abstiene's, apartiéner, (ar)retiéner, atiéner, captiéner, contiéner, desmantiéner, detiéner, entersostiene's, entertiéner, obtiéner, sostiéner.

VALER: valhi - valhas - valha - valham - valhatz - valhan

Se conjuguent comme valer: avaler, desvaler, prevaler, revaler.

VÉDER: vegi - vejas - veja - vejam - vejatz - vejan

Se conjugue comme véder: revéder.

VIÉNER: viengui - viengas - vienga - viengam - viengatz - viengan

La forme régulière existe aussi. La forme irrégulière présente l'avantage d'être proche du subjonctif de vénguer. Nous la conseillons.

Se conjuguent comme viéner: adviéner, (ar)redeviéner, aviéner-se'n, conviénguer, contraviéner, deviéner, desaviéner, desconviéner, interviéner, malaviene's, mauaviene's, previéner, proviéner, reconviéner, ressoviene's, reviéner, soviene's, subviéner, suberviéner.

VÍVER: visqui - viscas - visca - viscam - viscatz - viscan

Une forme régulière existe aussi, rarement employée. Se conjuguent comme víver: (ar)revíver, mauvíver, subervíver, susvíver.

  • Verbes en -IR:

GESSIR: gesqui - gescas - gesca - gescam - gescatz - gescan

IR: ge - ges - ge - gem - getz - gen

Ce verbe s'emploie dans les vallées d'Aspe et de Barétous à la place d'anar.


Modifications orthographiques

Verbes en -CAR, -ÇAR, -GAR et -JAR

Au présent du subjonctif des verbes en -CAR, -ÇAR, -GAR et -JAR, il se produit des modifications orhographiques destinées à maintenir la prononciation de la dernière consonne du radical:

ESPERRECAR: esperrequi - esperreques - esperreque - esperrequem - esperrequetz - esperrequen

DANÇAR: danci - dances - dance - dancem - dancetz - dancen

CARGAR: cargui - cargues - cargue - carguem - carguetz - carguen

AVEJAR: avegi - aveges - avege - avegem - avegetz - avegen


Verbes en -EAR et -OAR

En ce qui concerne les verbes en -EAR et -OAR, le -i de la 1ère ps prend un tréma pour éviter la diphtongue:

PLEAR: pleï - plees - plee - pleem - pleetz - pleen

ARMIROAR: armiroï - armiroes - armiroe - armiroem - armiroetz - armiroen


Place de l'accent tonique dans les verbes en -IAR et en -OAR

On se reportera à la fiche 3. B. Le présent de l'indicatif


Localismes

Prononciation des formes normatives

Au deuxième et au troisième groupes, le subjonctif se conjugue avec un [e] aux 2ème et 3ème ps et à la 3ème pp dans une grande partie du domaine (est et sud du Béarn, Bigorre, Armagnac). Les terminaisons en [ɔ] (en [a] dans certains parlers) sont propres surtout au Comminges. On a donc: bàtias [ˈbatjes] - bàtia [ˈbatje] - batiam [baˈtjam] - batiatz [baˈtjat(s)] - bàtian [ˈbatjen], et bastescas [basˈteskes] - bastesca [basˈteske] - bastescam [bastesˈkam] - bastescatz [bastesˈkat(s)] - bastescan [basˈtesken]. Dans une minorité de parlers, on trouve [e] même aux 1ère et 2ème pp.

On peut faire la même remarque en ce qui concerne le a de la désinence des verbes irréguliers; on a par exemple sias [ˈsies] - sia [ˈsie] - siam [ˈsjam] - siatz [ˈsjat(s)] - sian [ˈsien].

Dans les débuts de la graphie classique, il fut décidé de noter a partout, par souci de régularité et, sans doute, de conformité à l'étymologie. De ce fait, en Béarn du moins, on écrit partout a, sauf lorsqu'on veut transcrire un parler particulier. On pourra adapter la prononciation à l'orthographe et prononcer [ˈbatjɔs], [basˈteskɔs], [ˈbatjɔ], [basˈteskɔ], etc.


Forme de l'infixe du 3ème groupe

L'infixe des verbes du 3ème groupe a le forme -isc- dans le Gers, ne laissant à la forme -esc- qu'une petite zone ouest, ainsi qu'en Comminges.


Localismes à la 1ère ps

En ancien gascon, la 1ère ps était cante, bata, bastesca. Le -i, marqueur de la 1ère ps introduit au présent de l'indicatif à la fin du Moyen Âge, s'est, dans certains lieux (Gers, vallée d'Aspe), non pas substitué, mais ajouté; on a donc aujourd'hui des formes comme càntei, bàtei, bastésquei, non-normatives.

Ce phénomène concerne aussi l'imparfait de l'indicatif; on rencontre des formes comme avèvai.

Enfin, en vallée d'Aspe, par analogie, on dit au présent de l'inficatif: càndai [ˈkandɔj], bàtei [ˈbatej], bastéishei [basˈteʃej].


Localisme occidental

En gascon occidental (nord-ouest du Béarn, Landes), le subjonctif présent se forme avec la voyelle -i- à toutes les personnes; cela est dû à la confusion existant dans ce sous-dialecte entre -a et -e post-toniques, tous deux prononcés [ə]. Ce subjonctif en i est rhizotonique, c'est-à-dire que l'accent est sur la dernière syllabe du radical à toutes les personnes, y compris la 1ère et la 2ème pp. D'autre part, au troisième groupe, l'infixe inchoatif garde la même forme qu'au présent. On a ainsi:

CANTAR: canti - cantis - canti - càntim - càntitz - cantin

BÀTER: bati - batis - bati - bàtim - bàtitz - batin

DROMIR: dromi - dromis - dromi - drómim - drómitz - dromin

BASTIR: basteishi - basteishis - basteishi - bastéishim - bastéishitz - basteishin

Les verbes irréguliers forment également leur subjonctif à l'aide de cette voyelle i:

ESTAR: sii - siis - sii - síim - síitz - siin


Emploi du présent du subjonctif

Se poser la question de l'emploi du présent du subjonctif revient à se demander quand employer le subjonctif en général. De manière générale, le subjonctif exprime un fait virtuel (une opinion, une éventualité, un fait irréel, incertain ou envisagé). Alibert remarque que pour l'occitan, "l'usatge del subjontiu es mai espandit qu'en francés" (Gramatica occitana, p. 328). On distinguera plusieurs cas:


Dans les propositions subordonnées

Dans les propositions subordonnées, l'emploi du subjonctif est à considérer selon chaque type de subordonnées. On se référera donc aux fiches sur les différents types de subordonnées, où est expliqué dans quelles conditions employer le subjonctif.

Vòi pas que te mingen tot viu. (Bladé): "Je ne veux pas qu'on te mange vivant."

Qué vòs que digam? (Sarrieu): "Que veux-tu que nous disions?"


Dans les propositions indépendantes

  • Le présent du subjonctif s'emploie dans les propositions indépendantes pour exprimer le souhait; deux cas distincts:

— le verbe n'est pas introduit par un énonciatif ni par la conjonction que:

Diu m'ac perdone! (Palay): "Dieu me le pardonne!"

Se n'ane tau diable lo tribalh! (Casebonne): "Que le travail aille au diable!"

— le verbe est introduit par l'énonciatif E; c'est un équivalent de la locution français "pourvu que":

E vengan permèr non me n'ani (Bouzet): "Pourvu qu'ils viennent avant que je ne m'en aille."

  • En outre, le subjonctif peut remplacer l'impératif aux 2ème ps et pp, avec une nuance de politesse ou au contraire de rudesse:

Vediatz de har beròi. (Camélat): "Portez-vous bien."

Qu'arrecotescas anueit tà la cabana! (Camélat): "Tâche de rentrer ce soir à la cabane!"


Tournure particulière

Il existe une tournure particulière subjonctif + qui + subjonctif formant une proposition indépendante qui marque l'intensité:

Los gojatòts, lavetz, atise qui t'atise, / e mes l'òmi ‘smaliva e mes los auts d'arríser. (Palay): "Les jeunes gens, alors, d'attiser tant qu'ils le purent, / et plus l'homme se mettait en colère, plus les autres riaient."