Différences entre les versions de « 3. A. Diphtongues et triphtongues »

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Le gascon comprends de nombreuses diphtongues et quelques triphtongues.
En gascon, les groupes de deux voyelles peuvent noter des diphtongues et les groupes de trois des triphtongues.





Version du 16 décembre 2019 à 14:58

En gascon, les groupes de deux voyelles peuvent noter des diphtongues et les groupes de trois des triphtongues.


Les diphtongues

Généralités

On distinguera:

  • les diphtongues ouvrantes, à premier élément [j] ou [w]: [ja], [je], [jɛ]..., [wa], [we], [wɛ]...
  • les diphtongues fermantes, où [j] ou [w] sont l'élément final: [aj], [ej], [ew], [iw]...

Cependant, la prononciation des diphtongues peut être soumise est à une certaine variation diatopique (variation selon les régions) et il convient de le souligner le cas échéant.

Lorsque le premier élément d'une diphtongue ouverte est [j], il peut être écrit E ou I. Lorsque ce premier élément est [w], il peut être écrit O ou U, selon l'étymologie et la prononciation dans les autres dialectes occitans.

Dans le cas des diphtongues fermantes, [j] et [w] ne peuvent s'écrire que i et u, sauf exceptions, mais [j] peut s'écrire aussi j dans les lieux où cette consonne se prononce [j]. De même, v intervocalique se prononce parfois [w] dans certains mots et certaines régions. Nous ne considérons pas ces cas ici.

Dans les diphtongues ouvertes, lorsque le premier élément est E, la diphtongaison n'est pas systématique; ce point aussi sera laissé de côté ici; voir 2. B. La prononciation de E, troisième partie.

Pour l'étude détaillée ci-dessous, nous partirons de la graphie pour aller à la prononciation.

N. B.: pour indiquer que deux voyelles qui devraient former une diphtongue n'en forment pas une, on emploie le tréma. Toutefois, on l'emploie le moins possible:

flaüta [flaˈytɔ]

anoïr [anuˈi]

toüt [tuˈyt] "creux"

mais: atribuir [atɾiβyˈi], sans tréma.


I suivi d'une autre voyelle: IA, IE, IÈ, IO, IÒ, IU

hialat [hjaˈlat]

vièla [ˈbjɛlɔ]

hariòla [haˈrjɔlɔ] "fruit de l'arbousier"

  • IA en position post-tonique se prononce logiquement [jɔ] en gascon oriental:

bèstia [ˈbɛstjɔ]

En gascon occidental, on devrait prononcer [jə], mais la prononciation se simplifie en [i]:

bèstia [ˈbɛsti]

  • Dans briac, on prononce deux syllabes: [briˈak]
  • La locution i a ("il y a"), à ses divers temps et modes, se prononce [ja] comme attendu dans la plaine béarnaise et en Lavedan, mais [ʒa] en de nombreux lieux (Oloron, Ossau, Tursan...)
  • Deux I ne forment pas diphtongue: on ne prononce pas [ji] ou [ij], mais [i]:

sentii [senˈti] prétérit de sentir, "je sentis"

pàrii [ˈpaɾi] présent de pariar, "je parie"

  • IU représente généralement la diphtongue ouvrante [iw] comme dans adiu, mais il peut aussi représenter [jy], dans les mots se terminant par le suffixe -ut ajouté à un radical en -i: hariut, nerviut, omiut, vermiut.


O suivi d'une autre voyelle: OA, OE, OÈ, OI, OÒ

Les groupes de lettres OA, OE, OÈ et OI transcrivent généralement une diphtongue:

ahoalh [aˈhwaʎ] "flopée", "gibier de potence"

joen [jwen], [ʒwen]

Parfois, la diphtongue naît de la chute d'une consonne:

coar [kwa] (chute de [β])

soar [swa] (chute de [ŋ])

carboèra [kaɾˈβwɛɾɔ]

borroar [buˈɾɾwa]

motoòt [muˈtwɔt]

maisoòta [majˈzwɔtɔ]

  • Dans le cas de OI ([uj]), lorsque la diphtongue est tonique, sa prononciation passe à [wej] en Béarn et dans une partie de la Bigorre, alors que la plus grande partie du Gers garde [uj]:

poirir [pujˈɾi] (Béarn: [pwejˈɾi]

coire [ˈkujɾe] (Béarn: [ˈkwejɾe])

Cette tendance est moins forte lorsque [uj] est atone:

lampoinèr [lampujˈnɛ] ([lampwejˈnɛ] en Béarn, rare)

  • On emploie la forme avec tréma OÏ, non pas pour montrer l'absence de diphtongue, mais qu'on a affaire à une prononciation [wi] (et non uj]:

escoïcar [eskwiˈka]

  • Dans Loís ([lwis]), on doit en outre indiquer la place de l'accent tonique (on n'additionne pas un accent écrit et un tréma: l'accent l'emporte sur le tréma).

Dans les mots de formation savante, il n'y a en principe pas de diphtongue, mais on peut en trouver une dans la prononciation rapide:

coadjutor [kuadjyˈtu] ([kwadjyˈtu])

coerent [kueˈɾen] ([kweˈɾen])

  • On rencontre très rarement la suite de voyelles OU:

soutada "salaire" (on peut prononcer [suˈtaðɔ], ou, avec une diphtongue, [sewˈtaðɔ], [sɔwˈtaðɔ]).

  • alcoòl se prononce [alˈkɔl].


U suivi d'une autre voyelle: UA, UE, UÈ...

Ces groupes de deux lettres peuvent représenter une diphtongue à premier élément [w] (ex.: (wa]) ou un groupe de deux voyelles (ex.: [ua], mais aussi une diphtongue à premier élément [ɥ], comme dans le mot français aujourd'hui.

  • Les diphtongues en [w] sont le cas le plus fréquent: guardar, huec, huelha...
  • le groupe qwa se prononce souvent [kwa] (aquatic [akwaˈtik]), pas toujours cependant (quadre [ˈkaðɾe]).
  • On prononce deux voyelles dans des mots comme aduar, luèc, luet, enluar, barruèc, pruèr, atribuir, persuadir... Toutefois, dans la prononciation rapide, il est possible de prononcer [ɥa], [ɥe], [ɥɛ], etc.
  • eth tué, eth sué (formes des possesifs employées en Bigorre) se prononcent [et ˈtɥe], [et ˈsɥe].
  • Quelques mots acceptent les prononciations [w] ou [ɥ], selon les lieux: esdejuar ([ezðeˈʒwa], [ezðeˈʒɥa]), huet ([hwet], [hɥet]).
  • UE se réduit à [y] dans certains mots, selon l'étymologie, en Gascogne maritime et dans une partie du Gers et de la Bigorre: huéger [ˈhyʒe], huec [hyk].
  • En gascon général, UI correspond à deux voyelles, et à la diphtongue [ɥi] dans continuitat. En nord-gascon, il correspond à [yj] dans quelques mots: fruit, bruit.
  • Lorsqu'elles se trouvent à l'initiale d'un mot, ces diphtongues sont renforcées par [g] initial dans certains parlers: uelh [gweʎ] (Luchon)
  • Pour UU, voir ci-dessous.

I précédé d'une autre voyelle: AI, EI, ÈI, OI, ÒI, UI

Ces groupes de deux lettres équivalent toujours à une diphtongue: aimar, prosei, qu'èi, vedoi...

  • [aj] antétonique est réalisé [ɛj] dans la région d'Orthez et les Landes:

maison [mɛjˈzu]

  • [ej] et, souvent, [ɛj], sont réalisés respectivement [e] et [ɛ] en gascon pyrénéen:

Qu'ei eth mes bon qui èi [ke mmez βu ki è] (phrase entendue en vallée d'Aspe)

  • [ej passe à [ɛj] dans une partie du gascon occidental: Salies, Bayonne, gascon maritime, Chalosse occidentale):

prosei [pɾuˈzɛj]

  • On doit noter un tréma à la première personne du singulier du présent des verbes en EAR, OAR et UAR, afin d'indiquer qu'il n'y a pas diphtongaison: pleï, borroï, tuï...


U précédé d'une autre voyelle: AU, EU, ÈU, IU, ÒU, UU

Dans la plupart des mots courants, il n'y a aucune difficulté de prononciation: aujami, lhèu, hòu.

  • aur est à l'origine une graphie ancienne introduite par Lespy; on prononce [ɔɾ]. Cependant, rien n'interdit de réintroduire aussi la prononciation ancienne et authentique [awɾ].
  • paur (anciennement paor) se prononce [pɔw] dans tout le domaine gascon, mais les dérivés sont en [aw]: pauruc [pawˈɾyk].
  • [aw] antétonique passe à [ɔw] et même localement en [u] dans le nord-ouest du Béarn et le sud-ouest des Landes: autant [ɔwˈtan], [uˈtan].
  • EU atone s'affaiblit en [u] dans le sud-ouest des Landes: neurir [nuˈɾi].
  • IU correspond à [iw] dans quelques mots très courants: arriu, adiu, miut... On a vu qu'il transcrit [jy] dans certains mots, cf. supra.
  • En outre, il triphtongue en [jew] en gascon pyrénéen oriental: Diu [djew], nhèu (> *nièu > niu) "neige", escriut [esˈkɾjewt]...
  • La diphtongue [ɔw] se simplifie en [ɔ] dans la plus grande partie de la Bigorre et du Gers:

hòu [hɔw], Big. et G. [hɔ]

sòu se prononce [sɔ] même en Béarn, , mais la prononciation [sɔw] existe en Comminges. Pour soutada, cf. supra.

  • UU prononcé [yw] est très rare. En Béarn, on prononce [y] dans cuu [ky], [u] dans suu [su] ([siw] en Bayonne, et effectivement [syw] en Bigorre). Dans mossu'u (pour mossur lo), si la prononciation [muˈsyw] existe, on simplifie le plus souvent en [muˈsy] en amuissant 'u.
  • Les mots en [aw] et [iw] sont souvent prononcés avec un [t] final dans le nord-ouest du Béarn et la Chalosse:

en vaganau [em baɣaˈnawt]

menshidèu [menʃiˈðɛwt]

Qu'escriu [kesˈkɾiwt]

vei [bejt] "il voit"


Les triphtongues

Le gascon connaît quatre triphtongues, qui correspondent aux groupes UAU, IEI, UEI, UÈI, UEU, et marginalement une cinquième, notée UÒU.


UAU

Cette triphtongue est très rarement; on la trouve dans shuaus [ʃwaws]. En nord-gascon, on simplifie la prononciation en [ʃwaws].


IEI

On la trouve dans miei [mjej]. Cette triphtongue se réduit à [ej] en Bigorre et dans une partie du Gers ([mej]) et à [i] en gascon maritime ([mi]).


UEI

On la trouve, par exemple, dans hueita [ˈhwejtɔ].

  • On prononce [ɥej], [ɥɛj] en Lomagne: [ˈhɥɛjtɔ].
  • Dans nueit, elle tend à se réduire à [ej], [ɛj] en Bigorre, Gers, Tarn-et-Garonne et Lot-et-Garonne, et même à [e] en gascon pyrénéen: [net] (la forme net est une variante graphique admissible (Ensergueix)).
  • Dans certains parlers, tant occidentaux (Salies, Bayonne) qu'orientaux ou pyrénéens (Luchon), [wej] initial se renforce en [gwej].


UÈI

On trouve apuèi en gascon oriental, mais la prononciation est [aˈpɛj]. Globalement, [ɛj] est la prononciation de uei dans ces parlers, et on note e (sans accent) dans un souci d'unité graphique: nueit [ˈnɛjt]. Toutefois, à l'initiale, on entend uei [wɛj].


UEU

On la trouve dans ueu, bueu: [wew], [bwew].

  • Cette triphtongue [wew] se réduit à [yw] dans une zone comprenant un grand nord des Landes et la Gironde en partie, et une deuxième zone à cheval sur le nord du Gers, le dus du Lot-et-Garonne et l'ouest du Tarn-et-Garonne.
  • On insère un [g] initial dans ueu dans certains parlers: [gwew].


UÒU

Le groupe de voyelles UÒU note la triphtongue [jɔw], rencontrée tout à fait à l'est du domaine: [jɔw], [bjɔw]. On écrit alors uòu, buòu.