2. B. Les suffixes (2): diminutifs et augmentatifs

De Wikigram
Aller à la navigation Aller à la recherche

Les différentes sortes de diminutifs

Les diminutifs sont des noms ou des adjectifs formés à l'aide d'un suffixe, exprimant des nuances diverses: outre la petitesse, l'affection, la grâce, la tendresse, l'ironie ou le mépris.

Diminutifs en -ET, -ETA

Ils expriment la petitesse, mais aussi l'affection; on les emploie souvent pour parler de quelque chose qu'on aime: anjolet, arbolet, maisoeta, ostalet, esteleta.


Diminutifs en -ÒT, -ÒTA

Ils expriment aussi la petitesse, et soit l'affection, soit la compassion ou l'ironie, voire le mépris: tempsòt (petitesse), molieròta (affection), blanquishòt (compassion), praubòt (compassion, ironie ou mépris), bravolòt (affection ou ironie), charmantòt (id.), omiòt (mépris). Dans le Bas-Adour et une partie des Landes, le suffixe -ÒT, -ÒTA sert aussi à former des gentilés: Bidaishòt, "habitant de Bidache".


Diminutifs en -IN, -INA

Plus rares que les deux précédents, ils expriment la grâce, la joliesse, la tendresse: berogina, estelina, praubin.


Diminutifs en -ON

Beaucoup plus rares, ils expriment généralement la gentillesse, la délicatesse, la grâce: manon, mainadon, amigon, cabolon, mais s'appliquent aussi à des inanimés: soparon, caferon, voire à des quantités: drinon. Il n'y a pas de forme féminine en Béarn, mais l'Armagnac, la Bigorre et le Comminges en connaissent une en -ONHA: arrisonha, hilhonha, praubonha...


Remarque

Les diminutifs (surtout -et, -eta et -òt, -òta) peuvent se combiner entre eux: can --> canhòt ---> canhotet; Jantinon; Peiroton...

"— Qu’avè ua fioleta aus dits. — Ua fioleta quin ? — Ua fioletòta. Com açò." (Peyroutet)


Remarques diverses sur les diminutifs

Le large emploi des diminutifs

Les diminutifs s'appliquent aux noms et aux adjectifs; ils peuvent aussi s'appliquer aux noms propres, aux participes passés et aux adverbes:

Jantet, Janòta, Jantin, Janon, Miquelon

Diu, qui s’i enten quauque drin e qui l’a beròi heiteta... (Camélat)

Mossu’u curè que partí a plaserinas, en s’arrevirant soventòtas. (Eyt)

Seul le suffixe -òt peut s'appliquer à des verbes: amassotar, "ramasser un peu, ou peu à peu"; apeçotar, "tailler en menus morceaux"; dançotar, "danser un peu; sautiller"; tribalhotejar, "travailler un peu, faire un travail sans importance".


Augmentatifs

Changements de sens

Les noms munis d'un suffixe diminutif peuvent désigner un être ou objet en rapport avec ceux désignés par le nom de départ, mais distinct:

arrestèth pour arrastèth, "râteau"; arresterina, "petit râteau en bois";

barra, "barre" --> barròt, "bâton";

esclòp, "sabot" --> esclopeta, "petit sabot de femme, ordinairement orné;

gojat, "jeune homme" --> gojatòt, "petit garçon";

nueit, "nuit" --> nueitòta, "crépuscule".


Autres remarques

  • Des infixes tels que -ic-, -ilh-, -ish ou -ol-, rarement -ush- peuvent s'intercaler entre le nom de départ et le diminutif ou l'augmentatif:

aire --> airolet;

ausèth --> ausericòt;

babau --> babolet;

brave --> bravolàs;

cap --> cabolon; cabushòt;

causa --> causilhòta;

còr --> corishòt;

palle --> pallishòta;

praube --> praubishon;

ragòt --> ragolòt;

sòu --> souricòt, sourilhòt;

veire --> veirolet, veirolòt.

  • Les consonnes finales muettes (-n et r) peuvent aussi bien se maintenir que disparaître dans la formation des dimunutifs et des augmentatifs: on trouve aussi bien frairet (<-- frair) que maiòta (<-- mair), bossaloòt (<-- bossalon) que parpalhonòt (<-- parpalhon).
  • Les mots gascons ont subi une certaine usure phonétique depuis le latin; il arrive que les suffixes d'augmentatifs et de diminutifs s'accolent non pas à un mot gascon, mais à une forme de celui-ci plus proche de l'étymologie latine:

còrps --> corpishòt (Palay)

libe --> libròt (forme armagnacaise, refaite en Béarn: liberòt).

  • D'autres formations irrégulières ne s'expliquent pas par l'étymologie:

aso --> asolòt;

hardèu --> hardolòt;

hasan --> hasanhòt;

paisan > paisantòt (paisanòt existe aussi);

pan --> paitet;

pimpim --> pimpineta;

seror --> seroleta;

vath --> vadeta (Lavit).

  • Certaines s'expliquent par l'analogie:

cafè ---> caferon, par analogie avec les noms en -èr;

  • Les diminutifs de noms peuvent changer de genre par rapport au nom de départ:

aubèrja --> auberjòt (Camélat);

barra > barròt;

caisha --> caishòt (Manciet);

camisa > camisòt (Al-Cartéro);

copa > copishòt (Lapassade);

crampa --> crampòt (Palay);

esclòp --> esclopeta;

frinèsta --> frineston;

goja --> gojòt (Manciet);

hemna --> hemnòt (Daugé);

istoèra --> istoeròt;

maison --> maisoòt (Labeyrie);

man --> manon (Camélat);

pelha > pelhòt (Al-Cartéro);

teula --> teulon (Yan dou Sabalot).


Conseils pour parler et écrire

  • Les diminutifs et augmentatifs sont plus employés qu'en français. En particulier, on aura souvent intérêt à traduire par un diminutif l'adjectif "petit" du français: "la petite maison", la maisoeta, la maisoòta. Cela ne veut certes pas dire que l'adjectif petit, -a ne s'emploie pas en gascon ni qu'il faille placer un diminutif dans chaque phrase pour bien parler; en particulier, on prendra garde de ne pas employer les diminutifs dans les textes dont l'auteur n'est pas censé montrer ses sentiments personnels: rapport de stage, article de journal ou d'encyclopédie, par ex. Dans tous les cas, on se souviendra en employant les diminutifs qu'ils ont tous un contenu sémantique qui va au-delà de la petitesse.
  • Certains néo-locuteurs se méfient inconsciemment du suffixe de diminutifs -ET, -ETA, "suspect" en raison de sa ressemblance avec le suffixe français -et, -ette, et préfèrent employer -ÒT, -ÒTA, voire -IN, -INA. Or, le suffixe -ET, -ETA est aussi gascon que les autres diminutifs; de plus, chaque suffixe de diminutifs exprime sa propre nuance: on ne remplace pas -ET, -ETA par un autre suffixe de diminutifs sans risquer de commettre une erreur. Enfin, en évitant un suffixe qui "fait trop français", on accepte que le français conditionne l'usage qui est fait du gascon, ce qui revient à accepter l'influence française que l'on souhaitait éviter.