Différences entre les versions de « 2. B. Les suffixes (2): diminutifs et augmentatifs »

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'''Jantet''', '''Janòta''', '''Jantin''', '''Janon''', '''Miquelon'''
'''Jantet''', '''Janòta''', '''Jantin''', '''Janon''', '''Miquelon'''


'''Diu, qui s’i enten quauque drin e qui l’a beròi heiteta...''' (Camélat)
'''Diu, qui s’i enten quauque drin e qui l’a beròi heiteta...''' (Camélat): "Dieu, qui s'y connaît pas mal et qui l'a joliment faite..."


'''Mossu’u curè que partí a plaserinas, en s’arrevirant soventòtas.''' (Eyt)
'''Mossu’u curè que partí a plaserinas, en s’arrevirant soventòtas.''' (Eyt): "Monsieur le curé partit tout doucement, en se retournant assez souvent".


Seul le suffixe -''òt'' peut s'appliquer à des verbes: '''amassotar''', "ramasser un peu, ou peu à peu"; '''apeçotar''', "tailler en menus morceaux"; '''dançotar''', "danser un peu; sautiller"; '''tribalhotejar''', "travailler un peu; faire un travail sans importance".
Seul le suffixe -''òt'' peut s'appliquer à des verbes: '''amassotar''', "ramasser un peu, ou peu à peu"; '''apeçotar''', "tailler en menus morceaux"; '''dançotar''', "danser un peu; sautiller"; '''tribalhotejar''', "travailler un peu; faire un travail sans importance".

Version du 13 juin 2022 à 15:44

Dans cette fiche, nous traitons des suffixes diminutifs et augmentatifs. Ces suffixes peuvent s'appliquer aux noms et aux adjectifs, voire aux verbes et aux adverbes.


Les différentes sortes de diminutifs

Les diminutifs sont des noms ou des adjectifs formés à l'aide d'un suffixe exprimant des nuances diverses: outre la petitesse, l'affection, la grâce, la tendresse, l'ironie ou le mépris.


Diminutifs en -ET, -ETA

Ils expriment la petitesse, mais aussi l'affection; on les emploie souvent pour parler de quelque chose qu'on aime: anjolet, arbolet, maisoeta, ostalet, esteleta.


Diminutifs en -ÒT, -ÒTA

Ils expriment aussi la petitesse, et soit l'affection, soit la compassion ou l'ironie, voire le mépris: tempsòt (petitesse), molieròta (affection), blanquishòt (compassion), praubòt (compassion, ironie ou mépris), bravolòt (affection ou ironie), charmantòt (id.), omiòt (mépris).


Diminutifs en -IN, -INA

Plus rares que les deux précédents, ils expriment la grâce, la joliesse, la tendresse: berogina, estelina, praubin.


Diminutifs en -ON, -ONA

Beaucoup plus rares, ils expriment généralement la gentillesse, la délicatesse, la grâce: manon, mainadon, amigon, cabolon, charmantona, mais s'appliquent aussi à des inanimés: soparon, caferon, voire à des quantités: drinon. En Armagnac, en Bigorre et en Comminges, le féminin est en -onha: arrisonha, hilhonha, praubonha...


Remarques diverses sur les diminutifs

Combinaison de diminutifs

Les diminutifs (surtout -et, -eta et -òt, -òta) peuvent se combiner entre eux: can --> canhòt ---> canhotet; Jantinon; Peiroton...

— Qu’avè ua fioleta aus dits. — Ua fioleta quin ? — Ua fioletòta. Com açò. (Peyroutet)


Le large emploi des diminutifs

Les diminutifs s'appliquent aux noms et aux adjectifs; ils peuvent aussi s'appliquer aux noms propres, aux participes passés et aux adverbes:

Jantet, Janòta, Jantin, Janon, Miquelon

Diu, qui s’i enten quauque drin e qui l’a beròi heiteta... (Camélat): "Dieu, qui s'y connaît pas mal et qui l'a joliment faite..."

Mossu’u curè que partí a plaserinas, en s’arrevirant soventòtas. (Eyt): "Monsieur le curé partit tout doucement, en se retournant assez souvent".

Seul le suffixe -òt peut s'appliquer à des verbes: amassotar, "ramasser un peu, ou peu à peu"; apeçotar, "tailler en menus morceaux"; dançotar, "danser un peu; sautiller"; tribalhotejar, "travailler un peu; faire un travail sans importance".


Changements de sens

Les noms munis d'un suffixe diminutif peuvent désigner un être ou un objet en rapport avec ceux désignés par le nom de départ, mais distinct:

arrestèth pour arrastèth, "râteau"; arresterina, "petit râteau en bois";

barra, "barre" --> barròt, "bâton";

esclòp, "sabot" --> esclopeta, "petit sabot de femme, ordinairement orné";

gojat, "jeune homme" --> gojatòt, "petit garçon";

nueit, "nuit" --> nueitòta, "crépuscule".


Autres remarques

  • Des infixes tels que -er, -ic-, -ilh-, -ish ou -ol-, rarement -ush-, peuvent s'intercaler entre le nom de départ et le diminutif:

aire --> airolet;

ausèth --> ausericòt;

babau --> babolet;

cap --> cabolon; cabushòt;

causa --> causilhòta;

conde --> conderilhòt;

còr --> corishòt;

palle --> pallishòta;

praube --> praubishon;

ragòt --> ragolòt;

sòu --> souricòt, sourilhòt;

veire --> veirolet, veirolòt.

  • Les consonnes finales muettes (-n et -r) peuvent aussi bien se maintenir que disparaître dans la formation des dimunutifs et des augmentatifs: on trouve aussi bien frairet (<-- frair) que maiòta (<-- mair), bossaloòt (<-- bossalon) que parpalhonòt (<-- parpalhon).
  • Les mots gascons ont subi une certaine usure phonétique depuis le latin; il arrive que les suffixes d'augmentatifs et de diminutifs s'accolent non pas à un mot gascon, mais à une forme de celui-ci plus proche de l'étymologie latine:

còrps --> corpishòt (Palay)

libe --> libròt (forme armagnacaise, refaite en Béarn: liberòt).

  • D'autres formations irrégulières ne s'expliquent pas par l'étymologie:

aso --> asolòt;

fòto --> fotoròta (Peyroutet)

hardèu --> hardolòt;

paisan > paisantòt (paisanòt existe aussi);

pan --> paitet;

pimpim --> pimpineta;

seror --> seroleta;

vath --> vadeta (Lavit).

  • Certaines s'expliquent par l'analogie:

cafè ---> caferon, par analogie avec les noms en -èr; hasan --> hasanhòt (par analogie avec can ---> canhòt).

  • Les diminutifs de noms peuvent changer de genre par rapport au nom de départ:

aubèrja --> auberjòt (Camélat);

barra --> barròt;

caisha --> caishòt (Manciet);

camisa --> camisòt (Al-Cartéro);

copa --> copishòt (Lapassade);

crampa --> crampòt;

esclòp --> esclopeta;

frinèsta --> frineston;

goja --> gojòt (Manciet);

hemna --> hemnòt (Daugé);

istoèra --> istoeròt;

maison --> maisoòt (Labeyrie);

man --> manon;

pelha --> pelhòt;

pausa ---> pausòt;

teula --> teulon (Yan dou Sabalot).


Conseils pour parler et écrire

  • Les diminutifs et augmentatifs sont plus employés qu'en français. En particulier, on aura souvent intérêt à traduire par un diminutif l'adjectif "petit" du français: "la petite maison", la maisoeta, la maisoòta. Cela ne veut certes pas dire que l'adjectif petit, -a ne s'emploie pas en gascon ni qu'il faille placer un diminutif dans chaque phrase pour bien parler; en particulier, on prendra garde de ne pas employer les diminutifs dans les textes dont l'auteur n'est pas censé montrer ses sentiments personnels: rapport de stage, article de journal ou d'encyclopédie, par ex. Dans tous les cas, on se souviendra en employant les diminutifs qu'ils ont presque toujours un contenu sémantique qui va au-delà de la petitesse.
  • Certains néo-locuteurs se méfient inconsciemment du suffixe -et, -eta, "suspect" en raison de sa ressemblance avec le suffixe français -"et, -ette", et préfèrent employer -òt, -òta, voire -in, -ina. Or, le suffixe -et, -eta est aussi gascon que les autres suffixes de diminutifs; de plus, chaque suffixe exprime une nuance propre: on ne remplace pas -et, -eta par un autre suffixe sans risquer de commettre une erreur. Enfin, en évitant un suffixe qui "fait trop français", on accepte que le français conditionne l'usage qui est fait du gascon, ce qui revient à accepter l'influence française que l'on souhaitait éviter.


Les augmentatifs

Augmentatifs en -às, -assa

Les augmentatifs se forment généralement à l'aide du suffixe -às, -assa. Ils expriment la grandeur, mais sont la plupart du temps péjoratifs:

granàs "très grand" (souvent trop grand et mal fait)

bastissassa "grande et vilaine bâtisse"

omenàs, omiàs "homme grand, fort, grossièrement bâti; désagréable"

abitudassa "habitude invétérée et mauvaise"

marcadàs: "grand marché" (sans sens péjoratif)

Ils peuvent même exprimer simplement l'antipathie, en dehors de toute considération de taille ou de grandeur:

lo son espiar de regentàs (Javaloyès)

Ua hemnassa peut se dire de toute femme que l'on n'aime pas, même si a priori on ne le dira pas d'une femme de taille particulièrement petite.

Remarques

  • Le suffixe -às, -assa ne s'appliquent pas aux noms propres.
  • On trouve un seul cas où le suffixe s'applique à un adverbe: auganassas ("cette année", dans le passé; on dit d'ailleurs aussi bien auganòtas); il n'y a pas sa valeur augmentative-péjorative.
  • Par contre, le suffixe en - às, -assa s'applique à des verbes, quoique assez rarement:

acalhavar, "jeter des cailloux" --> acalhavassar, "jeter de nombreux coups de cailloux"

agergar, "arranger" --> agergassar, "arranger maladroitement, grossièrement"

blagar, "bavarder" --> blagassar, "parler à tort et à travers", "commérer"

cridar, "crier" --> cridassar, "criailler"

pintar, "boire beaucoup ou excessivement"; pintassar, "boire excessivement"

  • Divers infixes peuvent s'intercaler entre le radical du mot de départ et le suffixe:

bravilhàs, bravolàs: "trop brave", "brave à en être bête"

magrilhàs: "très maigre, sec"

  • le suffixe -às, -assa est parfois, mais rarement, redoublé avec un sens très augmentatif et/ ou très péjoratif:

praubassàs: "tout ce qu'il y a de plus misérable"


Augmentatifs en -arro, -arra, -òrro, -òrra

Beaucoup plus rares, les augmentatifs en -arro, -arra ou en -òrro, -òrra, ont toujours une valeur péjorative; ils ne semblent pas constituer une classe ouverte:

canharro: "chien grand et vilain"

gatarro: "gros matou désagréable"

monarro: "personne à la mine renfrognée"

tumarro, -arra: "sournois; revêche" (<-- tum, premier élément de tumahús)

cabòrra: "grosse tête" (avec changement de genre)

pegòrro: "imbécile; fat"

ventòrra: "gros ventre"