3. J. Les équivalents de MÊME

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"Même" en fr. est un mot polyvalent qui peut être tantôt déterminant-pronom, tantôt adjectif, tantôt adverbe. Cette fiche concerne tous les équivalents gascons de "même" fr.


"Même" indique l'identité

Sens

Placé avant le nom, "même" indique l'identité ou la ressemblance.


Équivalent gascon

L'équivalent gascon est medish (madeish en gascon pyrénéen), placé avant le nom:

Aqueste camin, jamei ne's mauta, que l'èi tostemps vist a la medisha plaça. (Lalanne): "Ce chemin, jamais il ne se bouge, je l'ai toujours vu à la même place."

Eth molièr qu'èra dera madeisha talha qu'eth monge. (Soulé): "Le meunier était de la même taille que le moine."


"Même" indique l'ipséité

Sens

Le fr. "même" peut indiquer l'ipséité, c'est-à-dire l'insistance mise sur l'objet ou la personne dont il est question (lui, ou elle, et pas un autre).


Équivalents gascons

  • L'équivalent gascon le plus courant est medish (madeish en gascon pyrénéen), placé après le nom. On rencontre cet usage dès le Moyen Âge:

Jo pausare suus ta case medixe... (Récits d'Histoire sainte): "Je poserai sur ta maison même..."

lo son frair medish (Camélat): "son frère même"

cadut au lòc medish on viscó sa misèria (Lapassade): "tombé sur le lieu même où il vécut sa misère"

lo bon Diu medish (Palay): "le bon Dieu même"

  • C'est notamment le cas avec les pronoms personnels toniques:

Dejà Bertomiu, eth medish, que cor de vilatge en vilatge ahuegar la blocardalha. (Badiolle): "Déjà Berthoumieu, lui-même, cour de village en village exciter les blocards."

No'm sòi gausat atrevir a hicar-la-i de jo madeish. (Escoula): "Je n'ai pas osé m'enhardir à l'y mettre de moi-même."

Dans ce cas, on peut employer medish seul (sans le pronom personnel) lorsqu'un nom propre précède:

Cohet medish no'n tiraré drin de lutz. (Camélat): "Le diable lui-même ne saurait s'y retrouver."

Los catalans medishs n'an pas ua dotzena de Guimeras. (Palay): "Même les Catalans (/les Catalans eux-mêmes) n'ont pas une douzaine de Guimeras."

Tot prosei d'explics qui vòu har valer ua òbra de vèrs non vau pas, de bèra pausa, la poesia medisha. (Camélat): "Toute prose d'explications qui veut mettre en valeur une oeuvre en vers est loin de valoir la poésie même."

On peut employer aussi medish seul lorsque la personne à laquelle on se réfère est évidente:

Vèn, qu'ac compreni pro, çò qu'a hèit, ath segur, / e çò qu'as hèit madeisha... (Sarrieu): "Va, je comprends plutôt bien ce qu'il a fait, assurément, / et ce que tu as fait toi-même."

  • C'est aussi le cas avec les adverbes et toutes les locutions de temps et de lieu:

Que'm sòi dejà pro estenut sus aqueth ahar en tres o quate articles parescuts ací medish. (Palay): "Je me suis déjà pas mal étendu sur cette affaire dans trois ou quatre articles parus ici même."

uei medish (Labaig-Langlade): "aujourd'hui même"

Tè, adara medish, que'vs comptatz en republica, e los deputats, qui's disen vòstes vailets, que son vòstes mèstes. (Larroque): "Tiens, en ce moment même, vous vous croyez en république, et les députés, qui se disent vos valets, sont vos maîtres."

lo ser medish (Sabalot): "le soir même"

lo dia medish (Javaloyès): "le jour même"

ua beròja bruna de Lavia medish (Casebonne): "une jolie brune de Lavie même"

Qu'èra arribat adaise a har un comís de perceptor a Beuste medish. (Canton): "Il était arrivé facilement à devenir un adjoint du percepteur à Beuste même."

  • Dans une large part du domaine gascon (Gironde, Landes et Gers en partie), on emploie plutôt quite (var. quiti), qui se place devant le nom:

La quita ombra d'aqueth òme non trobaràs. (Garros): "Même l'ombre de cet homme tu ne trouveras pas."

La quita pluja me tirava pas mèi deu piadar. (Manciet): "Même la pluie ne me faisait plus sortir de la pineraie."

Los gascons vertadèrs que comprengón e en 1900 se venoc 500 armanacs dens la quiti comuna de Vic. (Saint-Bézard): "Les vrais Gascons comprirent et en 1900 on vendit 500 almanachs dans la commune même de Vic."

Los quites mercats... ne me pòden pas mèi suportar. (Blanc): "Même les marchés... ne peuvent plus me supporter."

On n'emploie pas quite avec les adverbes.


"Même" adverbe

Sens

En fr., "même" est un adverbe qui "souligne la réalité du fait le plus improbable et conséquemment le plus significatif pour ce que l'on veut faire admettre" (Trésor de la Langue française). Ce sens est proche de l'ipséité, mais "même" adverbe, en fr., ne concerne pas seulement les groupes nominaux. Examinons les divers équivalents gascons, en commençant par signaler des usages fautifs.


Medish adverbe?

On peut considérer que medish est un adverbe lorsqu'il est employé avec les adverbes et les locutions de lieu et de temps (cf. ci-dessus, 2. 2.). Hors de cet emploi, le gascon n'utlise pas medish comme adverbe. Les exemples que l'on en trouve dans nombre d'oeuvres littéraires sont une gasconisation du francisme mèma, largement employé dans la langue parlée. Il n'y a pas lieu d'imiter ces exemples. V. cependant ci-dessous, tot medish.


Quitament?

Quitament n'a pas le sens de "même" en gascon, sauf dans les phrases négatives (cf. ci-dessous). L'emploi de quitament dans ce sens ne correspond à aucun usage gascon authentique. L'emploi de quitament hors contexte négatif au sens de "même" ne semble exister que dans certains parlers limousins. La lecture de l'article <quitamen> du Trésor du Félibrige est révélatrice à cet égard, celle du dictionnaire d'Alibert également. Le succès de quitament depuis les années 1990, dans les écrits peu soucieux de rigueur, semble surtout dû à son emploi comme calque en toutes circonstances de l'adverbe "même" du fr. On se tournera vers les équivalents gascons authentiques.


Medish / quite

  • On peut employer medish avec un groupe nominal pour rendre l'adverbe fr. "même"; il se place derrière le nom et s'accorde avec lui; on rejoint certains des cas vus ci-dessus:

Los catalans medishs n'an pas ua dotzena de Guimeras. (Palay): "Même les Catalans n'ont pas une douzaine de Guimeras."

Un mainat medish que la poderé miar! (Camélat): ""Même un enfant pourrait la conduire."

los sons uelhs, la soa votz, las soas mans medishas (Arantxa): "ses yeux, sa voix, même ses mains"

  • On peut également employer quite, dans les régions où ce mot est en usage:

Ua quita vesita, quan se tròban estremiats, lonh de pertot, que còsta astant que l'abonament d'un an de d'autes còps. (Sanson): "Même une visite, quand on se trouve à l'écart de tout, loin de partout, coûte autant que l'abonnement d'un an d'autrefois."


Dinc a

On employer dinc a avec un groupe nominal ou un verbe:

Gojats, òmis e dinc aus vielhs, tots que's hiquèn en *rond l'un darrèr l'aute. (Casebonne): "Jeunes gens, hommes mûrs et même les vieux, tous se mirent en rond l'un derrière l'autre."

Que's desbromban dinc a la lenga de Mairbona. (Badiolle): "Ils oublient même la langue de Grand-Mère."

E que comandarèi, dinc en non i estar pas! (Palay): "Et je commanderai, même en n'y étant pas!"


Autanplan

Autanplan s'emploie devant (parfois derrière) un groupe nominal, un complément circonstanciel ou une proposition:

Minjava carn en tot temps, autanplan lo Divés sant. (Bladé): "Il mangeait de la viande en tout temps, même le Vendredi saint."

Be poderà trobar un emplegat, cantonièr o vailet de vila, autanplan un factur o un jandarma, dilhèu un regent! (Casebonne): "Elle pourra bien trouver un employé, cantonnier ou fonctionnaire municipal, même un facteur ou un gendarme, peut-être un instituteur."

Au contrari que l'a tostemps dab eth, autanplan quan ei dab la soa hemna. (L'òrra istoèra d'un hilh de Gelòs): "Au contraire il l'a toujours près de lui, même quand il est avec sa femme."

un gave assasin hasent-s’ac tot seguir, los òmis autanplan. (Javaloyès): "un gave assassin qui emporte tout, même les hommes."

Atau que't poderàs esbàter peu garatge, ci'm disen, i shens dangèr, autanplan quan plau. (Sègues): "Ainsi tu pourras te défouler dans le garage, me disent-ils, et sans danger, même quand il pleut."


E tot

E tot s'emploie, postposé à un groupe nominal, avec le sens de "même" adverbial du fr.:

tiéner poras, guits, lapins, un pòrc e tot, lhèu (Peyroutet): "posséder des poules, des lapins, même un porc, peut-être"

Quauquarren que rogejava. Que s'i vedè eslamas e tot. (Peyroutet): "Quelque chose rougeoyait. On voyait même des flammes."

quan lo diable / e tot s'i hicaré (Palay): "quand même le diable se mettrait de la partie"

Se cau, qu'i serà enqüèra, uei qu'am vendut lo Barralh, mubles e tot. (Manciet): "Aussi bien, il doit y être encore, aujourd'hui que nous avons vendu le Barrail, même les meubles."

Dans les phrases négatives, on emploie ni arren à la place de e tot:

Non i a ni mandòrras, ni milhòc, ni hroment, ni milh moro ni arren. (Escoula): "Il n'y a ni pommes de terre, ni maïs, ni blé, ni même sarrazin."


Mei qu'aquò

Mei qu'aquò s'emploie avec des propositions, des phrases entières:

Per Nosta Dama, non la coneishí pas enqüèra, e adara ne'm pots pas har a l'idea de víver shens era; mei qu'aquò, l'aute vrèspe... que l'èi prometut de la miar tau pè de l'autar de Saliguèr tà de uei en un an. (Casebonne): "À Notre-Dame, je ne la connaissais pas encore, et maintenant je ne peux pas me faire à l'idée de vivre sans elle; même, l'autre après-midi... je lui ai promis de l'amener au pied de l'autel de Saligué dans un an jour pour jour."

Qu'ei, ci disen, lo Teocrite pirenenc, mei qu'aquò Jansemin que'u clama lo diu deus pastors. (Camélat): "Il est, dit-on, le Théocrite pyrénéen, Jasmin, même, l'appelle le dieu des pâtres."

Qu'èra simplament triste. Mei qu'aquò, tristàs a vomir. (Javaloyès): "C'était simplement triste. Même triste à vomir."


Qui mei

Qui mei (litt. "qui plus est") s'emploie dans les mêmes cas:

Aqueste dròlle qu'ei trabatent, flaunhèc, trufandèc, cascant, pauruc, e qui mei, plen d’aurugas. (Lapassade): "Ce petit est remuant, indolent, moqueur, sale, peureux, et qui plus est, plein de lubies."

Totas las lengas qu'an la frasa parlada e la frasa literari, sovent hèra diferentas l'ua de l'auta. Qui mei: non i a pas dus òmis qui s'*exprimen parièr. (Palay): "Toutes les langues possèdent la phrase parlée et la phrase littéraire, souvent très différentes l'une de l'autre. Qui plus est: il n'y a pas deux hommes qui s'expriment pareil."


Quan serà, quan seré

Quan serà, quan seré ("même si c'est", "même si c'était") s'emploient avec le sens de "même", avec une proposition, un nom, un adjectif, un adverbe, ou seul. Il y a une nuance entre les deux: quan serà suppose que ce qui suit est réalisé, quan seré signifie que ce n'est pas le cas (irréel du présent). Pour l'irréel du passé, on emploie quan seré estat.

En los har pagar comptant e quan seré d'avança, que vs'estiman e respèctan. (Palay): "En les faisant payer, d'avance même, ils vous estiment et vous respectent."

Las novèlas corren viste quan seré la nueit. (Sabalot): "Les nouvelles se répandent vite même la nuit."

Lo Bearn qu'ei mei beròi au clar de lua que lo dia, quan seré au mes de mai. (Lapassade): "Le Béarn est plus joli au clair de lune que le jour, même au mois de mai."

Tanlèu qui ved ua lutz, quan serà la lua, còcòricò! (Palay): "Dès qu'il voit une lumière, même la lune, cocorico!"

Ua pèça qui hè pensar, quan serà longtemps après l'aver entenuda, qu'ei ua pèça escaduda. (Palay): "Une pièce qui donne à réfléchir, même longtemps après l'avoir entendue, est une pièce réussie."

Totun, en minjar regularament, quan serà pauc, tot que's passa pro plan. (Lavit): "Pourtant, en mangeant régulièrement, même peu, tout se passe plutôt bien."

— Tu, qu’as ua idea de darrè'u cap. — E quan seré? (Palay): "— Toi, tu as une idée derrière la tête. — Et même?"


Tanben

On peut employer tanben, dont le sens est proche, dans nombre de cas; on l'emploie notamment avec les numéraux cardinaux:

... que la nueit deu 4 d'aost que volè díser quauquarren, e tanben entà la lenha. (Oéy en Bearn): "... que la nuit du 4 août voulait dire quelque chose, même pour le bois de chauffage"

Que me'n preni dus còps, e tres tanben. (Palay): "J'en prends deux fois, et même trois."


Tot medish

On trouve, rarement, tot medish avec un verbe, un groupe nominal ou une phrase entière:

... puishqu'en se burlar tot medish, / eth renèish e s'arrenavish. (Garros): "... puisque même en se brûlant, / il renaît et ressurgit."

Qu'escotaràn a jolhs e capbaishs, na Urraca tot medish. (Salanoubat): "Ils écouteront à genoux et tête baissée, même dame Urraque."


Dans les phrases négatives

  • Dans les phrases négatives, on emploie pas solament:

Ne me n'a pas solament parlat. (Hustach): "Il ne m'a même pas parlé."

N'avè pas solament espiat çò qui i avè deguens! (Courriades): "Il n'avait même pas regardé ce qu'il y avait dedans!"

Ne m'a pas solament responut. (L'estranh): "Il ne m'a même pas répondu."

I passèn palomas. Èi pas solament livat lo cap. (Manciet): "Il passa des palombes. Je n'ai même pas levé la tête."

Aqueth par de gojats ne tornavan pas mei, pas solament lo dimenge. (Sabalot): "Ces deux garçons ne revenaient plus, pas même le dimanche."

Toutefois, certains parlers emploient pas quitament:

Pair e mair e dròlles ne pòden pas quitament botar lo nas dehòra. (Daugé): "Parents et enfants ne peuvent même pas mettre le nez dehors."

  • De même après shens:

sens de saber har solament còser un ueu (Palay): "sans même savoir faire cuire un oeuf"

  • On trouve quite devant un groupe nominal, dans un contexte négatif:

Non sabèva pas un quite mot d’alemand. (Bec): "Il ne savait même pas un mot d'allemand."

  • On emploie aussi, rarement, pas tot escàs:

N'èi pas tot escàs podut díser adishatz aus nostes. (Palay): "Je n'ai même pas pu dire au revoir à ma famille."

  • Dans les écrits félibréens, on trouve souvent pas medish:

pas medish l'arrís d’un saunei (Palay): "pas même le sourire d'un rêve"

En réalité, il s'agit d'une correction erronée de pas mèma. Le francisme mèma est à rejeter et pas medish, qui en reste un calque, également; on emploiera pas solament.


"de même"

  • De même se dit atau medish: on est dans un des cas vus en 2.2

— Santat a tots! — Ben que'vs hàcia. — Santat e dinèrs. — Dab santat que ns'i posquiam tornar. — A la vòsta. — Atau medish. (Palay): "— Santé à tous! — Que cela vous profite. — Santé et argent. — Puissions-nous recommencer en bonne santé. — À la vôtre. — De même."

Nosautis qu'èm atau medish. (Garros): "Il en va de même pour nous."

  • Dans les salutations, les voeux, la langue parlée déforme atau medish en tau medish et même au medish:

— Bon vrèspe, madamisèla. — Tau medish, mossur. (Casebonne): "- Bonjour, mademoiselle. — Bonjour à vous, monsieur."

  • Atau medish s'emploie en corrélation avec com (fr. "de même que... ainsi"):

com un can esmalit se corroça, / atau medish aquera bèstia rossa / hasè cric-crac damb sas dents d’arressèga. (Garros): "comme un chien en colère se corrouce, / de même cette bête rousse / faisait cric-crac avec ses dents de scie."

  • Atau medish est synonyme de tanben; on ne perdra pas de vue cette synonymie en vue d'enrichir la langue, du moins la langue écrite.
  • "De même que" se dit atau com ou totun com; atau com équivaut aussi simplement à "comme":

Que't presentan, bèths còps, atau com lo simbèu / de l'arresisténcia a l'Empèri. (Lavit): "On te présente, parfois, comme le symbole / de la résistance à l'Empire."

  • On trouve encore totun, dont c'est le sens premier.


"Même si"

"Même si" est une locution conjonctive introduisant des subordonnées concessives; on se reportera à la fiche sur les subordonnées concessives.