2. C. L'accord du participe passé

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Le participe passé suit des règles d'accord différentes selon qu'il est employé avec l'auxiliaire estar ou avec l'auxiliaire aver.


Cas du participe passé employé avec estar

Le participe passé employé avec l'auxiliaire estar s'accorde en genre et nombre avec le sujet:

Tan valentas, las annadas / com jornadas qu’an corrut, / sauneis corts, aigas versadas, / non sèi quin se’n son anadas / shens brut. (Camélat): "Si courageuses, les années / comme des journées se sont écoulées, / rêves courts, eaux versées, / je ne sais où elles s'en sont allées / sans bruit."

Il s'accorde en genre, mais reste au singulier, dans le cas du "vous" de politesse et du "nous" de majesté:

Aquiu qu’èratz plan, perqué vse n'ètz anat?(Pucheu): "Là vous étiez bien, pourquoi vous en êtes-vous allé?"

Ne i a que quate pas, qu'ètz tornada d’abòrd. (Yan Palay): "Il n'y a que quatre pas, vous êtes revenue tout de suite."

Lo vilatge d'Espuei, on èm vadut... (Tucat): "Le village d'Espoey, où nous sommes né."

Lorsque le sujet est un adverbe de quantité suivi d'un nom, le participe passé peut s'accorder avec ce nom:

Drin de confusion qu’ei viste passada. (Palay): "Un peu de confusion est vite passé."


Cas du participe passé employé avec aver

Lorsque l'auxiliaire est aver, le participe passé ne s'accorde jamais avec le sujet, mais, dans certains cas, il s'accorde avec le complément d'objet direct si celui-ci est placé avant le verbe.


Le cas de lo, la, los, las

Lorsque l'auxiliaire est aver, le participe passé s'accorde en genre et nombre avec le complément d'objet direct si celui-ci est un des pronoms personnels compléments lo, la, los, las:

Jo que credí que l’avèn desbrombada. (Javaloyès): "Je croyais qu'on l'avait oubliée."

Contrairement à ce qui se passe en français, l'accord a lieu, dans ce cas, même pour les verbes deishar et har suivis d'un infinitif et les modaux:

Qu’ac sèi, ja, que’s son escapats, *qu’ei tu qui'us a deishats escapar! (Palay): "Je sais, oui, qu'ils se sont échappés, c'est toi qui les a laissé échapper!"

Uèra, mainada, qu’èi avut tres marits e tots tres (...) que'us èi hèits passar per on volí. (Palay): "Eh bien, jeune fille, j'ai eu trois maris et tous les trois (...) je les ai menés ["fait passer"] par le bout du nez."

Que’m sembla que las m'averí sabudas chausir, las ombras! (Courriades): "Il me semble que j'aurais su me les choisir, les ombres!"


Le cas de me, te, nse, vse

Lorsque le COD est un des pronoms personnels me, te, nse, vse, l'accord est fréquent, mais facultatif, y compris avec deishar et har suivis d'un infinitif et les modaux:

Que m’a ‘th sòn pes aucita. (Sarrieu): "Son poids m'a tuée."

Que diseram que ns'avetz voluts crompar. (Casebonne): "Nous dirons que vous avez voulu nous acheter."

Totara (...) que vs'èi vista... (Casebonne): "Tout à l'heure (...) je vous ai vue..."

Que’ns meritarem aquò, nosautas, per çò qui ns'a hèitas enmalir. (Palay): "Nous mériterions cela, nous, pour la façon dont il nous a fait mettre en colère."

Mais:

Quant de còps a la barguèra, / quant de còps au ton cledat, / no'm hes créder, mensongèra, / que mons huecs t'avèn tocat! (Despourrins): "Combien de fois au parc des moutons, / combien de fois à ton portail, / ne m'as-tu fait croire, menteuse, / que mes feux t'avaient touchée!"

Que m’an credut los insolents envejosa de companhia. (Fablas gasconas): "Les insolents m'ont crue désireuse de compagnie."

Richa valea, / gaimanda alea, / jòi paradís / tau que t'a vist! (Eyt): "Riche vallée, / enjôleuse allée, / gai paradis / pour qui t'a vue!"

Que i aurà vint ans, bèthlèu, qui ns'a quitat! (Abadie): "Il y aura vingt ans, bientôt, qu'il nous a quittés!"


Le cas de ac

Avec le pronom neutre ac, l'accord se fait au masculin singulier. Toutefois, lorsque ac, employé avec lo ou los, remplace un nom (l'ac, los ac), l'accord en genre et en nombre avec ce nom se fait généralement:

Qu’èra mau cadut e que s’avè copat ua espatla. De segur, n’èra pas un çurgent qui l'ac avè alogada, mes quauque pregandaire. (Palay): "Il était mal tombé et il s'était cassé une épaule. Évidemment, ce n'était pas un chirurgien qui la lui avait remise en place, mais quelque guérisseur."

Qu’ei la letra d’aqueth Francisco. Lo Menica que l'a deishada tà papà; que l'ac èi presa a la pòcha tant qui n'avè pas la vèsta. (Palay): "C'est la lettre de ce Francisco. Ménique l'a laissée pour papa; je la lui ai prise à la poche tant qu'il ne portait pas sa veste."

Lo mèste que s'èra avisat que la goja n'avè pas paur a la ploja ni... aus chivaus e que l'ac avè confiats. (Palay): "Le patron s'est rendu compte que la bonne n'avait pas froid aux yeux ni peur des chevaux et il les lui a confiés."


Le cas du complément d'objet direct repris par un pronom relatif

Lorsque le complément d'objet direct est repris par qui (ou que, dans d'autres parlers que ceux du Béarn et de la Bigorre), le participe passé ne s'accorde pas avec l'antécédent:

las plagas qui avè hèit un passat dolorós (Casebonne): "les plaies qu'avait faites un passé douloureux"

N'auratz pas arren a tornar, per totis los presents que vos an hèit. (Bladé): "Vous n'aurez rien à rendre, pour tous les cadeaux qu'on vous a faits."

Toutefois, lorsque le relatif est précédé de l'article défini ou d'un indéfini, l'accord est possible, sans être obligatoire:

ua part deus qui avè recebuts lo joen avocat (Palay): "une part de ceux qui avait reçus le jeune avocat"

... d'aqueths marins deu cap deu monde, deus qui s'avè gahats e qui n’a pas tornat (Nadau): "... de ces marins du bout du monde, de ceux qu'elle avait pris et qu'elle n'a pas rendus."

Quauqu'ua qui averàs vista (Bouzet): "Tu as bien vu une femme."

Mais:

... qui deus qui a tuat, / plea en un jorn tot un segrat. (Fablas gaconas): "... qui de ceux qu'il a tués, / emplit un jour tout un cimetière."

Toutefois, dans certains parlers, l'accord avec l'antécédent du pronom relatif a lieu:

Qu'èm auserons sense nada familha / que lo malur a caçats de son niu ! (Laclavère): "Nous sommes des oiseaux sans famille / que le malheur a chassés de son nid!"


Autres cas

Dans les autres cas (le COD est un groupe nominal, ou un pronom autre que personnel), l'accord du participe passé avec le complément d'objet passé avant le verbe est possible sans être obligatoire:

Com drin de borider lèu la pasta a tornada... (Bordeu): "De même qu'un peu de levain a bientôt changé la pâte..."

Senglas Suzas que ns’avem hèit petar. (Yan de Sègues): "Nous nous sommes envoyé une Suze chacun."


Particularité de la langue de Camélat

Dans la langue de Camélat, l'accord du participe passé avec le COD placé avant le verbe a toujours lieu:

Que credetz lhèu que n'èi aimadas quandas e quandas?: "Vous croyez peut-être que j'ai aimé des tas de femmes?"

Mais lorsque le COD est placé après le verbe, l'accord se fait souvent, mais pas toujours:

Que m'averí tirat la vèsta.: "Je me serais enlevé la veste."


Cas des temps surcomposés

Aux temps surcomposés, on fait l'accord du participe passé du verbe, lorsqu'il est prévu par les règles précédentes, mais aussi celui du participe passé de l'auxiliaire:

Aquera cançon, que l'èi avuda cantada.: "Cette chanson, il m'est arrivé autrefois de la chanter."